C’est subtil

Les années passent, et notre ligne artistique se fait chaque jour un peu plus précise.
Voici quelques disques sur lesquels nous travaillons actuellement et qui sortiront dans les mois à venir :
– Aälma Dili (tzigano-italo-folk)
– Asa-i-Viata (balkan rave)
– EZPZ (balkan hip-hop)
– Gypsetters (tzigano-club)
– La Dinamitaaa (cumbia-ragga-klezmer)
et bien d’autres.
Vous me direz : ah ouais donc vous faites de la world music en gros.

Moui. Mais c’est un peu plus subtil.

La world music ça existe depuis longtemps, plein de festivals et de radios en jouent. Mais si vous écoutez bien, vous remarquerez qu’il s’agit généralement de world music localisée. Elle provient d’une aire géographique, voire d’un pays précis. C’est sympa pour un festival d’avoir des artistes qui viennent de loin et de partout dans le monde, parce que du coup on a l’impression que le bled qui organise le festoche lui aussi s’intègre dans la Grande Famille des Cultures Officielles du Monde. Retrouvez ainsi Untel (de Corée) et Unetelle (du Pérou) à Saint-Machin-lès-Trucs au mois d’août. Saint-Machin-lès-Trucs, bled cosmopolite ouvert sur l’économie globalizey.

Un peu comme quand vous voyagez en Asie et que vous faites la tournée des hôtels pour touristes occidentaux.
C’est chouette, mais c’est pas exactement notre truc.

Il y a aussi la pop globalisée et universaliste, celle qui prône l’amour, ou l’argent, suivant le degré de fourberie du dispositif. Le tout avec des clips tournés en Islande et au Kenya avec des drones. Faut que tout le monde soit sur la photo, attendez on n’a pas d’Asiatique, trouvez-en un vite, ah voilà parfait. Et ouais c’est 2016 et on se fait tous l’amour au lieu de s’envoyer des bombes à la gueule t’inquiète.

Un peu comme si vous colliez un autocollant “I LOVE BUENOS AIRES” sur votre bagnole alors que vous n’y êtes jamais allé. C’est moins chouette, et c’est toujours pas exactement notre truc.

Notre truc, c’est d’essayer de rencontrer l’autre vraiment, pas juste squatter ses restos ou l’ajouter en ami sur internet. En l’occurrence, comme nous sommes des musiciens, ça veut dire s’intéresser à sa musique et (ô scandale !) apprendre à la jouer. Cette démarche nous vaut parfois d’être accusés d’appropriation culturelle. Nous avons réfuté ces accusations notamment ici, en expliquant la différence entre jouer de la musique et s’approprier une culture.

Pour nous, la musique est un langage. Si j’apprends le polonais, ou si je travaille mon accent chilien, je fais de l’appropriation culturelle ? Non ? Et bah alors.

Sur ces disques à venir, vous trouverez donc des artistes qui passent leur vie à explorer des sonorités, des harmonies, des rythmes différents.
Vous trouverez des artistes qui n’ont pas peur de mélanger leur musique de coeur (parce qu’elle leur vient de leur famille, leur région, leur jeunesse) avec d’autres musiques.
Vous trouverez des artistes qui sortent de leur zone de confort et qui s’aventurent dans des zones de turbulence.
Pour le reste, voyez avec la concurrence.

Nous rediscuterons de tout cela et de bien plus avec plaisir sur notre stand n°-1.11 au Womex la semaine prochaine.