2017 c’est pas compliqué : les puissants sont devenus tellement puissants que pour nous niquer, ils se contentent de nous empêcher de réfléchir à c’est quoi au juste la puissance.
Excellent exemple que cette révolution numérique qui agite les mp3 du monde libre et des autres. Posez-vous 5 minutes à la lecture de cet article pour faire le point.
Depuis 10 ans, vous avez probablement été utilisateur de Multimania, Lycos, Voila, MySpace, Grooveshark, Bandcamp, SoundCloud, ReverbNation, Spotify, iTunes et j’en passe (plein). Résultat, vous ne vendez pas plus qu’avant, vous jouez toujours pour un Guso et vous avez perdu un temps colossal et précieux.
Pourquoi ces plateformes coulent-elles ? Pourquoi n’y en a-t-il pas une ou deux qui tiennent un peu le coup ? Pourquoi les indépendants doivent-ils s’adapter en permanence aux modèles pensés par et pour les industriels ? Réponse : c’est structurel.
Quand une plateforme grossit, arrive le moment où les majors s’y intéressent. Elles vendent l’accès à leur catalogue (vous savez, Michael Jackson et Herbert Léonard) contre des parts du capital. En cas de succès, elles gagneront bien plus que les centimes que Spotify vous jette à la gueule chaque mois. Potentiellement, elles n’ont même pas besoin de vendre de la musique pour gagner – encore moins de la bonne.
Ça vous le saviez déjà, sauf si vous découvrez ce blog aujourd’hui.
C’est donc précisément à ce niveau de développement qu’une plateforme meurt. Quand le deal des majors l’étouffe trop et que son modèle (basé sur la pub car les gens ne sont évidemment pas prêts à payer pour entendre Michael Jackson) n’est pas suffisamment bien branlé pour retenir les investisseurs. Lesquels reprennent leurs billes, à la limite eux c’est pas grave ils sont juste là pour rigoler, sauf que le pop-corn est plus cher qu’au Pathé.
Résultat, rhooo dommage les gens n’ont pas eu le temps d’exploiter les formidables algorithmes de recommandation et de recherche pour découvrir de sympathiques et méritoires artistes indépendants : ils ont créé un compte, vendu leur cerveau, écouté les playlists Spécial Fête des Mères et ça y est le site est devenu ringard. Allez sèche tes larmes on remet ça sur le nouveau site trop bien foutu vite vite viens y’a le dernier [insérez ici le nom d’un artiste pop d’appropriation culturelle] en exclu.
Dans cette course sans fin, seuls les artistes des majors tirent leur épingle du jeu : vous savez ceux qui sont toujours en homepage et dans les playlists Fête des Mères. D’ailleurs, si la course s’arrêtait, ce serait un problème pour eux, puisque les utilisateurs commenceraient à fouiner un peu pour écouter autre chose, juste pour voir. Alors qu’à chaque nouveau site, on a déjà tellement à faire pour naviguer dans l’interface et les playlists : au fond, tant pis si c’est la même musique que d’habitude.
Internet aurait pu mettre tous les artistes à égalité, dans un genre de Wikipédia du streaming. Naturellement, les industriels cherchent toujours la bonne méthode pour éviter que cela arrive, car ils cesseraient alors d’être compétitifs et crèveraient comme un vulgaire intermittent. Vu qu’artistiquement ils sont vraiment à chier, leur survie ne tient qu’à leur omniprésence, alors oublie l’idée d’un site où on pourrait en un clic passer de Coldplay à Salut les culs.
C’est contre-intuitif, mais peut-être qu’un boycott généralisé et joyeux de la part des indépendants nous sortirait le cul des ronces.